Sous l’emprise de la violence, les jeunes brisent la glace
« Les violences basées sur le genre (VBG) naissent à partir des inégalités entre les sexes, l’abus de pouvoir et les normes néfastes. On dénombre différents types (physiques, économiques, sexuelles, verbales et autres) et peuvent avoir de graves conséquences sur votre vie, votre avenir, votre santé et même la société », a déclaré Madame Daïka FANFAN, intervenant à la dernière journée de formation, le vendredi 26 juillet 2024.
Cette activité a été réalisée par l'Organisation de Développement et de Lutte contre la Pauvreté (ODELPA), du 23 au 26 juillet 2024, en son local. Supportée financièrement par le Haut-Commissariat des Nations-Unies pour les Réfugiés (HCR), cette deuxième cohorte a accueilli une trentaine de jeunes en provenance de Fort-national et Saint Martin.
Intervenant sur les VBG et ses corollaires, la facilitatrice a mis accent sur les types et les formes de violences également les conséquences qui en découlent. Elle a proposé des travaux de groupes permettant à l’assistance de distinguer la typologie de ce fléau dont la majorité des victimes sont des filles et des femmes. Madame FANFAN, n’a pas raté
l’occasion de prodiguer quelques conseils aux bénéficiaires. « Lorsque vous êtes victimes de violences, peu importe sa forme, ne gardez pas le silence. Parlez-en à votre entourage pour trouver de l’aide », a-t-elle relaté.
Une présentation qui a poussé certains participants de rompre le
silence. Avec beaucoup d’émotions, ils ont partagé leurs histoires.
Certaines plus tristes et poignantes que d’autres.
Le tableau sombre de Nancy
« Nous sommes en 2016, il était 4 heures environ, lorsque je sortais du
travail, en compagnie de ma cousine. Arrivées sur la route de Delmas,
des hommes armés nous ont braqué et nous ont demandé nos valises.
Alors que ma cousine a vite donné la sienne, moi je résistais. Vous
saviez combien c'est difficile de refaire certaines pièces en Haïti. Ce
jour-là, j’ai vécu un enfer que je m’en souviendrai jusqu’à ma mort »,
a-t-elle balbutié pour éviter de fondre en larmes.
Elle a émis un grand soupir avant de continuer : « Je me suis fait
bastonner pendant plusieurs minutes, finalement ont m’avait pris la
valise. Et j’avais tout perdu. Ma cousine, quant à elle a été tombée en
syncope, elle a rouvert les yeux le lendemain à l’hôpital. Depuis, je
me suis dit que je dois laisser le pays, pour essayer de dissiper cette
douleur ».
Nancy n’a pas connu une enfance facile, fille d’un homme marié, elle
a du vivre avec sa belle mère pour que ce dernier puisse répondre à ses
obligations paternelles. « C’était pas du tout facile de vivre avec ma
belle mère, j’ai connu des jours sombres » a-t-elle déclaré, en évitant
de donner plus de détails sur cette page de sa vie.
Résidente à Fort-national, aujourd’hui elle effectue des activités
commerciales pour subvenir à ces besoins et ceux de ses deux filles.
« Je ne me résume pas à l’idée d’attendre qu’un homme me donne un
mieux-être. J’ai appris à me débrouiller seule afin que mes enfants ne
manquent de rien. Quoique l’insécurité est criant dans la zone, je fais
de mon mieux pour les protéger et les donner une vie meilleure » a-t-
elle émis dans un brin d'espoir.
L’assaut de la violence, une nuisance au quotidien de Tara
« Dans mon quartier la violence se voit à l’œil nu, les hommes
lourdement armés font la parade à longueur de journée » a confié Tara,
une autre participante. Âgée de 24 ans, elle habite à la rue des arts
plastiques, un quartier du bicentenaire. Étudiante finissante en
assistance administrative, c'est un périple pour elle d'effectuer des
allers-retours entre sa maison et l’université. « Je ne me sens pas bien,
je suis impuissante face à une telle réalité. En tant que jeune femme, je
me sens vulnérable. J’entends constamment parler des mauvais actes
que commettent ces hommes dans d'autres zones voisines. Cela me
perturbe énormément » nous a-t-elle confié.
D’autre témoignage
Pour Joseph qui vient de la rue des Remparts, au bas Bel-Air, la situation
n’est pas trop différente « Je fais face personnellement à la violence
psychologique. De temps à autres, des détonations d’armes à feu
retentissent dans la zone. Je ne cesse de voir des jeunes passer de vie à
trépas sous mes yeux, pourtant ils n’avaient pas encore vécu leur
temps destiné. On se lève chaque jour en se demandant qui sera le
prochain cible », a-t-il déclaré en essayant de dissimuler la crainte qui
se lit sur son visage.
En dépit de toutes ces violences, ces jeunes croient encore en un Haïti
meilleur, voilà pourquoi ils ne cessent de s’instruire. Participer à cette
session de formation leur a été bénéfique, nombreux sont ceux qui
promettent de partager les connaissances acquises au cours de ces
quatre jours au sein de leur entourage (association, amis, familles),
entre autres.
NB : Les noms du texte sont des emprunts.
Marc-Kerley FONTAL
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